L’atlas des paysages d’Auvergne - 2011
À côté des emblèmes régionaux que constituent les grands massifs volcaniques, l’Auvergne est riche de situations paysagères variées, souvent contrastées. Des volcans aux plaines, il subsiste quantité de régions intermédiaires, qui méritent une identification approfondie, afin de mettre en évidence des qualités qui doivent demeurer des points d’appui pour les projets de territoires, les aménagements contemporains.
La carte des familles propose ainsi neuf catégories, pour distinguer les grands types de paysages que l’on rencontre en Auvergne. Cette typologie tient compte de critères topographiques et écologiques, plus que d’une distinction rural/urbain, et propose de rattacher ainsi chaque ville ou agglomération à un arrière-plan paysager spécifique. Ce document présente chacune de ces familles, en les illustrant par un choix de photographies panoramiques ; il donne les principaux éléments d’identification des paysages regroupés dans cette catégorisation.
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Carte de familles de paysages
Les hautes terres
L’ensemble des paysages des hautes terres regroupe des espaces qui ont pour la plupart la valeur d’emblèmes pour la région Auvergne, et font l’objet de démarches de protection, de valorisation et de labellisation qui contribuent à en élargir la renommée. Les paysages des hautes terres sont avant cela le lieu d’une expérience de l’étendue, de l’altitude, de formes issues de mouvements géologiques complexes. Ils sont aussi issus de l’adaptation des pratiques agricoles à des conditions difficiles, à des milieux contraints, qui génèrent des habitats singuliers, qu’ils soient permanents (fermes massives de la Margeride ou du Devès, par exemple) ou temporaires (burons du Cantal, jasseries des Hautes-Chaumes du Forez). Ces espaces donnent donc lieu à des productions identifiées par des labels : AOC fromagères, d’élevage (fin-gras du Mézenc), de cultures (lentilles du Puy), tandis que certains massifs accueillent des équipements touristiques de sport d’hiver (Massif du Cantal, Sancy). Ces données, combinées aux besoins de protection naturaliste concentrent l’attention des collectivités, qui doivent résoudre des équations complexes en matière de gestion écologique, touristique ou agronomiques. Les hautes terres peuvent donc aussi être considérées comme des laboratoires en matière de gestion collective des espaces, de démarches de projet qualitatives et concertées.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les montagnes boisées
Des croupes sombres, d’un aspect austère, au premier abord ; une couverture boisée continue, qui drape le relief sur des dizaines de kilomètres : les montagnes boisées de l’Auvergne se singularisent en premier lieu par l’emprise de l’activité forestière sur le milieu, selon une orientation économique et paysagère dominante. Montagne bourbonnaise, Montagne noire et Haut-Livradois constituent trois bordures marquantes à l’échelle du paysage régional, visibles de loin, et qui sont autant d’horizons quotidiens pour les habitants des plaines et des limagnes, au levant. Ces régions ne sont cependant pas des déserts forestiers que l’on n’investirait qu’épisodiquement, à l’occasion d’une poussée de cèpes. L’habitat occupe des clairières, en situation de plateau ou de flanc de vallée, et trahit une présence humaine ancienne, une histoire riche. Paysages à regarder dans le temps, dans leur évolution et non dans une stricte apparence actuelle, ils reflètent des modes d’occupation et de mise en valeur qui prirent tour à tour des formes variées : clairières monastiques (plateau de la Chaise-Dieu), « montagnes ateliers » (montagne thiernoise, ou bois noirs), exploitations minières (montagne bourbonnaise), exploitation éolienne aujourd’hui. Autant de signes qui témoignent d’une vitalité insoupçonnée, relayée depuis quelques dizaines d’années par une multitude d’opérations de développement local et associatif. La forêt domine, mais n’est en rien le seul prisme pour comprendre ces espaces : aussi les modes d’exploitation doivent-ils aussi tenir compte de cette diversité d’usages et d’appropriation.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les coteaux et pays coupés
L’expression de pays coupés est employée pour désigner un système de plateaux nettement entaillés par des vallées profondes, laissant en suspens autant de petits pays, d’espaces d’accès malaisés, de petits “bouts du monde”. Les franges des grands massifs en regorgent, et ces situations offrent bien souvent un aperçu saisissant sur les plaines, en contrebas, aussi bien que sur les hautes terres, plus haut. On trouve d’un pays coupé à l’autre de longues échines incurvées, ou bien des tables plus horizontales dans le cas des régions volcaniques. Souvent habités en situation de crête ou de rebord, ces replats ou ces échines sont très souvent cultivés, à l’inverse des pentes qui sont désormais le plus souvent boisées et désertées des habitants, ou en voie de l’être (la vigne pouvait y tenir une place importante). Mais les crêtes et les vallées profondes constituent visuellement un seul et même ensemble de paysages, liés en un même système. Et la vue d’un plateau à l’autre constitue alors un vis-à-vis qui nuance l’impression d’isolement. Dans cet ensemble de paysages, le coteau, la pente est la problématique majeure pour toute activité humaine, toute implantation. La faille de la Limagne est l’exemple emblématique d’un tel espace de bascule, livré en son pied et en son rebord haut à la croissance urbaine : situation privilégiée qui recouvre aussi une multitude de situations de transition plus discrètes, d’abris ou bien de promontoires. Chaque intervention prend donc souvent, dans ces secteurs, une visibilité extrême.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les campagnes d’altitude
Entre l’Auvergne des hautes terres et l’Auvergne des limagnes subsistent de nombreuses entités géographiques et ensembles de paysages, qui doivent être mis en évidence sous peine de passer pour des régions « de transition », dont les qualités échapperaient à la description : Combrailles, Bas-Livradois, Velay, plateaux d’accès au Forez ou à la Margeride. Régions de plateaux d’altitude comprises entre 500 et 1000 mètres, elles sont avant tout des aires dédiées à l’agriculture d’élevage. Leurs parties sommitales, souvent boisées, n’ont pas la monumentalité des grands ensembles volcaniques, mais leurs qualités se révèlent à l’échelle de structures paysagères plus fines, s’accordant à la découpe du relief. Celui-ci est majoritairement constitué par des pénéplaines (plateaux érodés et creusés de vallées en V) et le vallonnement doux des sols granitiques. Comme les régions plus basses des bocages, ces ensembles de paysage évoluent au rythme des transformations des exploitations agricoles, connaissant localement des bouleversements rapides, dont les logiques peuvent être sujettes à controverse : reflet d’un certain dynamisme pour les uns, aménagement produisant de l’indifférenciation pour les autres. Le terme de « campagne d’altitude » exprime ainsi le fait que ces ensembles de paysage se définissent durablement par les modes d’occupation agricoles de la moyenne montagne, dont sont tributaires leurs formes visibles.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Le bocage
Le paysage du bocage se caractérise en premier lieu par un parcellaire entouré de haies, enserrant des parcelles majoritairement dédiées à l’élevage, bordant routes et chemins. De l’herbe et des haies : l’image est assez simple à comprendre, mais ne peut résumer à elle seule les ensembles de paysage du Bourbonnais. Car des différences notables subsistent, ou des modulations fines qui doivent être identifiées localement pour faire émerger des singularités au cœur de ce qui semble homogène, sans fin. Terrains argileux de la Sologne bourbonnaise, Marches et contrefort des massifs granitiques, réseaux de vallées, grands secteurs forestiers constituent autant d’espaces que l’on peut démêler les uns des autres en traversant le Bourbonnais. Mais les différences s’observent surtout à une échelle plus fine, secteur par secteur, en décelant les modes d’entretien des réseaux de haies. De hautes chambres cloisonnées par des chênes émondés, on peut descendre vers des espaces presque entièrement décloisonnés, où la haie n’apparaît plus que comme une relique. Les paysages du bocage sont essentiellement le reflet des pratiques, des gestes, de l’outillage et de la philosophie que les hommes adoptent face à l’arbre, à leurs bêtes, à leurs modes de production.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les limagnes et terres de grande culture
On doit aux cassures du vieux socle hercynien l’existence des limagnes d’Auvergne, fossés d’effondrement que le travail des eaux a successivement comblés puis dégagés, et dont il resulte une grande diversité de paysages. Encadrées des montagnes au sud de l’Auvergne (depuis Brioude), elles gagnent en ampleur au nord, en atteignant le Bourbonnais. À l’est, à l’approche du Livradois, elles prennent tour à tour un caractère argileux et humide, ou épousent les bombements volcaniques du Billomois. Ce sont des paysages à mieux connaître et à reconnaître : en un autre temps, un observateur traversant la région n’aurait peut-être pas fait grand cas des massifs, des plateaux et des bombements aujourd’hui élus par nos préférences paysagères. Mais son œil se serait réjoui de ces vastes plaines cultivées, de l’idée de profusion qui s’y attache encore. L’opulence des cultures répond à celles des fermes, lorsque de grands domaines y furent constitués. L’arbre, autrefois très présent, redoublait cette impression. L’eau, plus rare, connaît des parcours discrets. Ça et là ces paysages sont relevés de touches méridionales, voire italianisantes : ces signes demeurent, à côtés des grands aplats céréaliers. Les dynamiques périurbaines s’y confrontent, suivant les grands tracés routiers et autoroutiers… et les villes investissent massivement ces plaines nourricières, au fur et à mesure que le lien de la proximité alimentaire se distend.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les bassins
Ce sont quatre perforations du paysage auvergnat, quatre dépressions nettement imprimées dans la topographie régionale : des bassins, fossés d’effondrement géologique, auxquels des épisodes de comblement, voire d’activité volcanique, ont donné des formes singulières, protégeant des foyers d’installation humaine singuliers. C’est ce que l’observateur peut retenir des paysages urbains du Puy-en-Velay ou du site voisin de Polignac, et à Aurillac. Au cœur du Livradois, la vaste dépression qui s’ouvre d’Ambert à Arlanc constitue une rupture nette entre les deux massifs qui l’encadrent ; enfin, le bassin de Maurs semble déjà ouvrir l’Auvergne vers les régions plus sèches du Quercy, offrant un seuil méridional à toute la région de la Chataigneraie. D’échelle modeste face à des ensembles de paysage plus conséquents, c’est la force du contraste qui les fait exister à l’échelle du découpage régional, ainsi que de petites singularités, à l’échelle du détail, répercussions de leur origine mouvementée : constructions de pisé en Livradois, affleurements crayeux autour d’Aurillac et de Maurs, diversité des brèches au Puy, qui se reflètent dans l’habitat par une multitude de touches. Des paysages à regarder de près, donc.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les vals et grandes rivières de plaine
Au débouché des massifs, les rivières qui irriguent l’Auvergne connaissent une seconde existence : du ravin on passe au val. Libérés de l’emprise rocheuse, grossis de leurs principaux affluents, les cours d’eau majeurs s’installent et dessinent des paysages plus amples. À travers le Bourbonnais, ils sont au nombre de trois : l’Allier, colonne vertébrale du territoire régional ; le Cher, qui descend des Combrailles, et la Loire, qui constitue la frontière nord-est de la région. Dans leurs parcours de plaine, ces rivières ont dessiné un paysage encore mouvant, soumis à l’aléa des crues, à des déviations subites dont les parcellaires ruraux conservent parfois la trace. Des structures plus rigides peuvent alors répondre, à quelque distance, à ces cours capricieux : vieux tracés des routes royales, adaptés générations après générations aux besoins du trafic routier ; canaux latéraux, constituant des chambres paysagères linéaires, en fonction de l’état de leurs plantations d’alignement. Des terrasses alluviales constituent des marques plus fines qui perpétuent le souvenir du passage de l’eau. Elles différencient les étages de la plaine, espace facilement cultivable ou appropriable à l’approche des villes. Leurs talus constituent peut-être des détails à l’échelle du grand paysage, mais qui peuvent être lus comme le support pour des projets mieux articulés au système hydrographique d’une grande vallée.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
Les vallées, gorges et défilés
Une rupture nette, profonde, dans le continuum des plateaux et des monts : un obstacle à franchir, au prix de nombreux lacets, ou bien d’une prouesse technologique (que l’on songe au viaduc de Garabit ou aux nouveaux viaducs autoroutiers). Les grandes vallées de l’Auvergne, dans leur partie médiane, entre sources et parcours de plaine, tiennent toutes ce rôle de séparation, d’écartement entre des mondes distincts. Comme la Dordogne, elles sont parfois devenues des frontières régionales. Ces univers peuvent aussi donner lieu à une exploration et une circulation plus longitudinale, en constituant des corridors routiers, ferroviaires, installant des modes de parcours continus, offrant de remonter ou de descendre le cours de l’eau. Pour soutenir ces parcours, des situations d’éperon, de voltes, de défilés, d’à pics, de verrous offrent autant de repères, de points de mire à l’observateur. L’époque médiévale a laissé, en maints endroits, des éléments architecturaux conjugués aux singularités du relief ; le souci du pittoresque en a fait des tableaux appréciés ; la politique des sites les a identifiés et a tenté d’en protéger les principales qualités visuelles. Le XXe siècle a équipé certaines de ces vallées de barrages. Aujourd’hui des préoccupations écologiques font de ces vallées des espaces à enjeux : remontée du saumon, gestion de landes, maintien de forêts de versants… ce haut degré d’imbrication du sauvage et de l’infrastructurel, dont le Haut-Allier pourrait être l’emblème, est l’une des caractéristiques principales de cet ensemble de paysages.
Ensembles de paysages appartenant à cette famille :
- 9.01 Défilés du Val d’Allier
- 9.02 Vallée et gorges du Haut Allier
- 9.03 Vallée et gorges de la Haute Loire
- 9.04 Vallée et gorges de la Truyère
- 9.05 Vallée et gorges de l’Alagnon
- 9.06 Vallée et gorges de la Cère
- 9.07 Vallée et gorges de la Dordogne
- 9.08 Vallée et gorges de la Dore
- 9.09 Vallée et gorges de la Durolle
- 9.10 Vallée et gorges de la Sioule
- 9.11 Vallée de la Besbre
Méthode d’élaboration de l’atlas d’Auvergne
Découvrez la méthode : L’atelier mobile
Guides thématiques sur les relations homme/milieu
Cette rubrique est constituée de dix-sept “guides-enquêtes” thématiques qui permettent, sous différents angles, d’aborder et de se questionner sur les diverses modalités de relations que les hommes entretiennent avec leur milieu.Chaque guide-enquête présente une sélection de 25 à 50 exemples parmi plus d’un millier de situations d’aménagement rencontrées en Auvergne durant la fabrication de l’atlas. Cette sélection orientée permet de rendre compte et d’identifier les façons dont les hommes aménagent, ménagent, gèrent, modifient, transforment, conservent, protègent, regardent, détruisent… leur environnement au quotidien. Ceci sous des angles aussi variés que les actions en faveur de la biodiversité, les actions de stockage, les rapports à l’eau, les processus de construction de l’habitat aujourd’hui, le maraîchage, l’action d’abandonner un espace, l’acte de reconvertir, l’acte d’aménager des belvédères ou des espaces publics, de favoriser la présence des arbres hors forêt ou encore de produire ou acheminer l’énergie…
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