4.03 Contreforts de Margeride
Ce texte est le résultat d’un agencement des choses dites par des paysagistes et leurs invités, tous embarqués dans une camionnette-voyageuse à travers l’Auvergne. Pour cet ensemble de paysages, il a été écrit à partir de tout ce qu’ils ont été capables de voir ensemble, durant les itinéraires n°05 et n°10 des ateliers mobiles des paysages qui se sont tenus le 21/06/2011 et le 20/07/2011.
1. SITUATION
L’ensemble de paysages des Contreforts de Margeride comprend un ensemble de reliefs d’altitude moyenne, situé à cheval sur les départements de la Haute-Loire et du Cantal. Bordé à l’est par l’ensemble de la Vallée et des gorges de l’Allier (9.02), à l’ouest par celui de la Vallée et des gorges de l’Alagnon (9.05) et au sud par celui de la Margeride (1.08), cet ensemble de paysages se caractérise par une succession de gradins, montant progressivement de 600 mètres à Lorlanges (au nord) jusqu’au pied des crêtes de la Margeride, à Montchamp (1100 mètres).
Cet ensemble appartient à la famille de paysages : 4. Les campagnes d’altitude
Les unités de paysages qui composent cet ensemble : 4.03 A Plateau de Lorlanges / 4.03 B Plateau de Saint-Beauzire / 4.03 C Plateau d’Ally / 4.03 D Plateau de la Chapelle-Laurent / 4.03 E Plateau de Rageade et de Lastic (Transition avec 1.08 Margeride).
2. GRANDES COMPOSANTES DES PAYSAGES
2.1 Une forme générale de pénéplaine.
2.2 Une vocation agricole dominante qui s’organise aujourd’hui en grosses structures modernes visibles.
2.3 Des différences liées à la plus ou moins grande proximité des infrastructures de transport ou des centres urbains.
2.4 La cristallisation de "petits confins".
2.5 Un exemple de "petit territoire de confins" : la vallée de la Cronce.
2.6 Occupation ancienne des points hauts.
Dans la partie nord de l’ensemble de paysages, de nombreux châteaux ponctuent l’espace des plateaux et vallées : au Bos, à Lespinasse, à Chabreuges, à Védrines, à Lachaud, à la Chomette par exemple.
2.7 Après la modernisation de l’agriculture, un deuxième mouvement d’industrialisation : l’énergie éolienne.
2.8 La vie autour de la voie ferrée désaffectée : exemples de reconversion d’une infrastructure abandonnée.
- Le tunnel ferroviaire à fromages : à Cournil, la voie ferrée remontait la vallée du Céroux. Elle a été transformée en chemin suffisamment solide et large pour que des camions puissent l’emprunter. Le chemin est une voie sans issue. Au bout, un tunnel ferroviaire a été transformé en local de stockage et d’affinage du fromage (tome du Cantal). Des cars entiers de touristes viennent visiter le tunnel à fromages ;
- La maison de garde-barrière : dans la partie basse de Cournil, la maison et le terrain du garde-barrière ont été transformés en partie en ferme ;
- La voie ferrée constructible : en entrant dans la Chapelle-Laurent, une maison a été construite sur le talus de la voie ferrée. Les terrains de la voie ferrée sont redécoupés en parcelles de foncier à bâtir pour étendre le bourg ;
- Autour de la gare désaffectée : à la sortie d’un bourg, l’ancienne zone de la gare est devenue une zone d’activité de campagne. Une laiterie et une scierie sont en fonctionnement. La place devant la gare est utilisée pour le stockage de bois de la scierie.
3. MOTIFS PAYSAGERS
3.1 Les lieux et motifs du fromage.
Il y a un "paysage du fromage" en Auvergne. Il rassemble des formes d’aménagement et des lieux qui parfois peuvent être très singuliers (comme le tunnel de stockage de Cournil). Il commence par la qualité de l’herbe dans les prés et toutes les variations de gestion que cela implique en fonction des altitudes et des situations climatiques. Il comprend toutes les formes de stockages temporaires de l’herbe et les différentes apparences des champs au cours de l’année. Il comprend les troupeaux de vaches ou ovins qui sont, en ce qui concernent les vaches, des motifs paysagers, au moins dans le Cantal. Il comprend tous les chemins qui servent au système de déplacement des troupeaux : drayes spécialement fabriquées pour canaliser les bêtes ou chemins de tailles variables menant aux champs entre les haies… Il comprend tous les systèmes de délimitation ou de fermeture des parcelles (haies, fossés, clôtures à piquets de pierre ou de bois…). Il comprend les différentes façons dont les arbres isolés sont présents (au bord des villages, des fermes, des routes et des parcelles) et les modes d’exploitation ou de taille de chacune en fonction de l’usage fourrager qui en est fait ou qui en a été fait. Il comprend encore tous les "outils" actuels des agriculteurs, tous les bâtiments d’exploitation avec souvent, comme motif plus contemporain, l’association stabulation-maison d’agriculteur. Aujourd’hui, un motif est en voie d’apparition : la toiture photovoltaïque. Enfin, il comprend tous les lieux de fabrication, de stockage et d’affinage qui peuvent être variés et surprenants : burons d’altitude, caves à fromage creusées dans la pierre ponce à Champeix, caves à Saint-Diery similaires aux caves d’Aubière utilisées pour le vin, tunnel de Cournil… Au-delà, il comprend même le système de distribution du fromage qui prend différentes formes dont celle du marché local et celle de points de vente directe comme à la fromagerie de la Chapelle-Laurent (cf. exemples de projet locaux).
3.2 Moulins à vent.
Vers Saint-Poncy, depuis la route départementale 10, on peut voir en contreplongée un moulin à vent en état de marche. Il avait été positionné sur une crête au-dessus de la vallée de l’Alagnonnette. L’utilisation de l’énergie du vent sur le plateau d’Ally est ancienne. Trois moulins de ce genre préexistaient au projet d’installation du champ éolien.
4. EXPERIENCES ET ENDROITS SINGULIERS
4.1 La zone d’activité fantôme.
Au bord de l’autoroute A75, une zone d’activité économique a été implantée. Des travaux relativement importants d’aménagement ont été réalisés. La route a été recalibrée. La première tranche de travaux a eu lieu en 2007. La deuxième en 2008. Jusqu’à aujourd’hui, en 2011, seule une cuve de stockage de gaz liquide à été installée. Le reste est vide. Aucune entreprise n’est venue s’installer à cet endroit pourtant entièrement pré-aménagé à cet effet. Une étude réalisée par la Caisse des Dépôts et des Consignations indique que pour 100 hectares urbanisés, 25 hectares deviennent ensuite des "délaissés" (source : la Forêt des délaissés - l’Atelier, Éd. Institut Français d’Architecture, 2000, textes de Francis LACLOCHE (CDC), L’Atelier, Gilles CLÉMENT, Romain PARIS, ADEF). La zone d’activité récemment aménagée a permis l’installation d’une végétation pionnière intéressante et diversifiée. Elle est en train d’évoluer vers une phase de démarrage forestier. C’est un très beau "jardin en mouvement" favorable à l’installation d’une forme de diversité végétale et animale, bien qu’elle soit le résultat de l’échec d’un aménagement.
4.2 Les nombreux points de vue panoramiques.
Du fait de l’organisation générale des reliefs des contreforts de la Margeride, on s’y trouve souvent soit sur des points de vue en balcon sur des vallées, soit sur des points hauts panoramiques à trois cent soixante degrés. Pour exemples : point de vue du Loubarcet, point de vue des Loubières, point de vue de Volmadet, point de vue du village de Vernières près de Massiac, point de vue de la table d’orientation au-dessus de Lestival près de Langeac…
4.3 Borne kilométrique en pierre de taille : le petit patrimoine routier.
Après Lubilhac et la Fage, une ancienne borne kilométrique en pierre de taille de grande dimension qui sert à signaler la démarcation entre le département du Cantal et celui de la Haute-Loire est toujours en place. Ce genre de bornes départementales devient de plus en plus rare le long des routes. Comme les bornes kilométriques, elles sont remplacées par des panneaux métalliques. Elles deviennent de fins piquets d’une cinquantaine de centimètres de hauteur surmontés d’un petit panneau qui ressemble à une étiquette de jardin botanique. Les bornes anciennes, par leur rareté et leur âge, peuvent être considérées comme une forme de "petit patrimoine routier". Devenues désuètes, divers travaux routiers ont modifié les distances kilométriques entre les bornes entrainant leur retrait systématique. Alors même qu’une route est un linéaire de signes, une grande source d’émission de signes dans les territoires. La route départementale 7, puis la 175 et la 12 dans l’ensemble des Contreforts de la Margeride, témoignent encore de l’existence de ce petit patrimoine ordinaire auquel on accorde peu d’attention.
5. CE QUI A CHANGE OU EST EN TRAIN DE CHANGER
- L’installation d’éoliennes
Dans ces paysages fortement marqués par l’alternance de plateaux cultivés et de vallées boisées, les dynamiques d’installation d’éoliennes ont contribué depuis 2003 à une transformation importante de ces ambiances. L’installation d’éoliennes autour d’Ally a alimenté une production d’images nouvelles du secteur, associant souvent les nouveaux aérogénérateurs et les moulins emblématiques du plateau.
- L’agrandissement des exploitations agricoles.
(cf. Grandes composantes de paysages : une vocation agricole dominante qui s’organise aujourd’hui en grosses structures modernes visibles.)
- Boisements et enfrichement dans les vallées et dans les têtes de vallées.
(cf. Grandes composantes de paysages : la cristallisation de "petits confins".)
- Influences diverses de l’autoroute A75.
Elles se font ressentir aujourd’hui dans le paysage : développement pavillonnaire autour des hameaux agricoles ; déséquilibre de l’occupation du territoire par le jeu des proximités avec les axes de communication ; construction de zones d’activités déjà désuètes le long de l’autoroute…
(cf. Grandes composantes de paysages : des différences liées à la plus ou moins grande proximité des infrastructures de transport ou des centres urbains.)
(cf. Expériences et endroits singuliers : la zone d’activité fantôme.)
6. VERSION IMPRIMABLE
[
]