9.06 Vallée et gorges de la Cère
Ce texte est le résultat d’un agencement des choses dites par des paysagistes et leurs invités, tous embarqués dans une camionnette-voyageuse à travers l’Auvergne. Pour cet ensemble de paysages, il a été écrit à partir de tout ce qu’ils ont été capables de voir ensemble, durant l’ itinéraire n°15 de l’atelier mobile des paysages qui s’est tenu le 24/10/2011.
1. SITUATION
L’ensemble de paysages de la Vallée et des gorges de la Cère (département du Cantal) est divisé en deux parties : l’une est en amont du bassin d’Aurillac, l’autre en aval. Elles sont toutes deux orientées nord-est/sud-ouest, direction donnée par le cours d’eau. La limite amont de l’ensemble est particulièrement bien marquée, puisqu’elle correspond au verrou glaciaire du Pas de Cère, caractérisé par un resserrement des flancs de la vallée. La limite aval correspond à la limite départementale avec le Lot et la Corrèze. A l’ouest du bassin d’Aurillac, dans la partie aval de l’ensemble de paysages, la vallée de la Cère est encaissée et ennoyée, à partir de Saint-Etienne-Cantalès, par le lac du barrage. Elle est au contact de la Châtaigneraie cantalienne (4.06), plus au sud. A l’est du bassin d’Aurillac, la vallée de la Cère est une vallée glaciaire typique, en forme d’auge. Dominée par le plateau du Coyan en rive droite et le plateau de Badailhac en rive gauche, elle constitue une entaille profonde de 350 mètres de dénivelé, qui permet d’accéder très facilement à la partie centrale du Massif du Cantal (1.05).
Entre les deux parties de cet ensemble, entre les deux bouts des gorges de la Cère, la plaine alluviale (entre Aurillac et Saint-Etienne-Cantalès), issue de la confluence de différentes rivières (Cère, Authre, ruisseaux des Quitiviers et d’Antuejoul…) offre des paysages qui contrastent avec ceux plus en amont et plus en aval. C’est l’ensemble de paysages du bassin d’Aurillac (7.03).
Cet ensemble appartient à la famille de paysages : 9. Les vallées, gorges et défilés
Les unités de paysages qui composent cet ensemble : 9.06 A Haute vallée de la Cère / 9.06 B Vallée de la Cère (Transition avec 7.03 Bassin d’Aurillac) / 9.06 C Retenue de Saint Etienne-Cantalès / 9.06 D Gorges de la Cère.
2. GRANDES COMPOSANTES DES PAYSAGES
EN AMONT DU BASSIN D’AURILLAC
2.1 La vallée en U, Vic et la Cère.
2.2 La vallée prise entre deux plateaux.
2.3 Les alignements d’arbres et le bocage de fond de vallée.
2.4 Une mise en valeur intégrale du fond de la vallée en évolution.
2.5 La vallée axe de communication.
2.5.1 L’ancien axe principal de communication sur les crêtes.
La voie romaine reliant Massiac à Arpajon-sur-Cère (via Celtica), ancêtre lointaine de la route nationale 122, suivait la ligne de crête descendant du Plomb du Cantal et passait à Curebourse.
2.5.2 Une vallée aménagée en voie de communication devenue une sorte de "vallée-vitrine" du massif du Cantal.
La principale caractéristique de la vallée de la Cère est la présence marquante d’éléments variés d’aménagement liés aux différents axes de communication qui se rejoignent à l’approche du tunnel du Lioran (talus, viaducs, tunnel, alignements d’arbres…), de la route nationale 122 et de la ligne de chemin de fer. En effet, la vallée de la Cère, sur l’axe Aurillac/Clermont-Ferrand, est une zone particulièrement fréquentée tant en période hivernale (proximité de la station de ski du Lioran) qu’en période estivale (station touristique de Vic-sur-Cère). Les paysages traversés constituent en cela une vitrine du massif cantalien à laquelle il faut particulièrement prêter attention.
2.5.3 La route nationale 122.
2.5.4 La voie ferrée.
La voie ferrée reliant Aurillac à Clermont-Ferrand remonte la vallée de la Cère en rive gauche, à flanc de versant exposé au nord. Elle bascule ensuite dans la vallée de l’Alagnon par un tunnel sous le col du Lioran. Elle a fait l’objet de travaux de maintenance à l’automne 2011 dans le cadre du Plan Rail mis en place par le Conseil Régional.
2.5.5 Le rapport évolutif des bourgs aux axes de communication : l’exemple de Thiézac et sa gare.
2.6 Une vallée agricole habitée en voie de périurbanisation.
2.7 La périurbanisation au son des cloches.
La tendance, depuis son avènement comme axe principal de communication du Cantal, est de faire de cette vallée de montagne un espace actuel très singulier, ni véritablement urbain ni plus véritablement agricole, où se côtoient les modes d’aménagement les plus contemporains et le son relativement ancestral des cloches qui indique, même lorsqu’on ne les voit pas, la présence des vaches dans le silence matinal.
EN AVAL DU BASSIN D’AURILLAC
2.8 Mémoire de la Résistance.
Le barrage de Saint-Etienne-Cantalès est situé sur la Cère, affluent de la Dordogne. L’aménagement hydro-électrique du barrage a été réalisé entre 1939 et 1946, pendant l’occupation allemande. Il fait partie du réseau des lieux de mémoire de la Résistance, comme, notamment, le barrage de l’Aigle sur la Dordogne : les ingénieurs, techniciens et ouvriers du chantier ont activement participé aux réseaux de la Résistance. La première mise en eau a eu lieu en 1945. Est née une retenue d’environ 12 kilomètres de long et 55 kilomètres de pourtour.
2.9 La retenue de Saint-Etienne-Cantalès.
2.10 L’apparence changeante des berges.
2.11 L’atmosphère industrielle de lac de barrage accentuée par le chemin de fer ancien.
Depuis la base de loisirs du Puech des Ouilhes, la vue sur le pont de chemin de fer métallique qui traverse le bras amont du lac accentue le caractère industriel du paysage de retenue de barrage.
3. MOTIFS PAYSAGERS
3.1 Les alignements d’arbres et haies du bocage de la vallée en amont du bassin d’Aurillac.
Leur présence récurrente participe clairement de l’ambiance bucolique du fond de vallée (cf. Grandes composantes de paysages : les alignements d’arbres et le bocage de fond de vallée.)
3.2 Les aménagements ferroviaires et routiers plus ou moins anciens.
La vallée est ponctuée de constructions ou aménagements ferroviaires et routiers qui apparaissent et disparaissent au gré des accidents de relief et de la présence des arbres. L’histoire de la vallée comme axe de déplacement majeur local a laissé des témoignages plus ou moins anciens d’aménagements (cf. Grandes composantes de paysages : La vallée, axe de communication.)
3.3 Les nombreux châteaux et les demeures bourgeoises.
Perchés ou tapis au fond d’un repli de terrain : Comblat, Pesteils, Clavières, Vixouze, Caillac… (cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département du Cantal, Diren Auvergne, février 2007).
4. EXPERIENCES OU ENDROITS SINGULIERS
EN AMONT DU BASSIN D’AURILLAC
Une abondance de sites pittoresques accessibles a servi au développement du tourisme thermal de la vallée.
4.1 Le rocher des pendus, vue panoramique sur la vallée et les monts du Cantal.
Vic-sur-Cère est dominé par un rocher appelé le rocher des Pendus. Très à la vue de la ville, ce rocher était autrefois utilisé comme une potence. Les condamnés étaient poussés dans le vide. Leur cadavre restait ainsi pendant le long de la paroi comme valeur d’exemple pour les habitants qui vivaient en bas. Une table d’orientation présentant des éléments d’interprétation a été positionnée sur le site. Le long du chemin d’accès au rocher, un banc d’un âge certain est posté à l’endroit théorique d’une vue imprenable, mais la forêt a gagné et empêche désormais l’accès au panorama. Aujourd’hui sur le versant sud du rocher, une carrière en activité extrait des granulats.
4.2 La cascade du Faillitoux.
Au fond d’un vallon facilement accessible à pied près de Thiézac, la cascade du Faillitoux est un saut spectaculaire de plus de quarante mètres de haut du petit cours d’eau de Lasmolineries sur une falaise de basalte (cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département du Cantal, Diren Auvergne, février 2007).
4.3 La cascade de la Roucolle.
Juste avant que le ruisseau de Lasmolineries se joigne aux eaux de la Cère, il fait un saut spectaculaire. On découvre la cascade depuis un belvédère en surplomb, sur le chemin du site du Pas-de-Cère.
4.4 Le site du Pas-de-Cère.
Le verrou glaciaire du Pas-de-Cère constitue un seuil paysager particulièrement important. La vallée s’ouvre brusquement après son franchissement et perd en partie son aspect "montagnard". Un projet de réaménagement est à l’étude afin de réorganiser et rendre confortable l’accès et la déambulation dans le site (cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département du Cantal, Diren Auvergne, février 2007).
EN AVAL DU BASSIN D’AURILLAC
4.5 Vue panoramique disparue sur la retenue du barrage de Saint-Etienne-Cantalès.
Sur la route départementale 18, juste après Lacapelle-Viescamp, l’Hôtel du Lac avait été construit, au bord de la route, avec une vue panoramique sur la retenue d’eau du barrage de Saint-Etienne-Cantalès. Une inscription en gros caractères annonce une terrasse avec vue panoramique. Mais le caractère panoramique de la vue a disparu derrière les arbres.
4.6 Le pont fantôme.
Le niveau actuellement faible du lac de retenue de Saint-Etienne-Cantalès (octobre 2011) laisse émerger l’ancien pont de pierre qui permettait, avant la construction du barrage, de passer par-dessus l’Authre, affluent de la Cère. L’Authre se jette maintenant dans la retenue à cet endroit. L’ancien pont est d’habitude sous les eaux. Il est rare qu’il réapparaisse. Un pont moderne a été construit pour enjamber la gorge quelques mètres au-dessus de l’ancien pont. La superposition des deux ponts découverts par la baisse du niveau de l’eau crée un effet fantomatique.
4.7 Exemple avorté de la pression de l’urbanisation : l’opération du Diamant vert.
La proximité d’Aurillac (à moins de vingt kilomètres) a favorisé le développement d’une forme d’urbanisation importante autour du lac de retenue du barrage de Saint-Etienne-Cantalès. Il fait partie d’une catégorie de lacs en Auvergne, comme le lac d’Aydat et le lac Chambon par exemple, qui subissent une véritable pression de l’urbanisation pour la villégiature, du fait principalement de leur situation et de leur accessibilité.
Un exemple singulier en témoigne clairement : le projet avorté du Diamant vert, une opération de logements collectifs, avec vue panoramique sur le lac, dont le chantier a commencé il y a une vingtaine d’années et qui n’a finalement jamais vu le jour, suite à une faillite de la société qui menait le projet. Un pont sur la voie de chemin de fer permettait l’implantation de l’opération au plus près des rives du lac, à quelques centaines de mètres du bourg de Lacapelle-Viescamp. Le gros œuvre en béton et parpaing a été entièrement réalisé. Jusqu’au carrelage sur les murs des cuisines et des salles de bain. L’opération immobilière a mené à la construction d’une ruine. La végétation s’est développée autour et dans les bâtiments qui ne sont plus très visibles de loin. Les bouleaux se sont interposés entre les bâtiments et la vue sur le lac. Des saules poussent dans les dalles des étages ouverts au vent et sur les balcons. Des mousses recouvrent les cages d’escalier à ciel ouvert. Des érables sycomores se sont développés dans un puits de jour. Des eupatoires chanvrines et des orties ont colonisé une zone effondrée. Le lierre grimpe sur les murs en parpaings tagués. Le bâtiment est devenu un étrange jardin accueillant pour la biodiversité.
4.8 Laroquebrou et son rocher de la Vierge : une atmosphère urbaine charmante de petit Puy-en-Velay.
Le dispositif spatial de Laroquebrou avec son rocher au centre, belvédère surmonté d’une statue de la Vierge, n’est pas sans rappeler l’expérience du Puy-en-Velay (cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département du Cantal, Diren Auvergne, février 2007).
5. CE QUI A CHANGE OU EST EN TRAIN DE CHANGER
- Le développement urbain dans la vallée.
La proximité d’Aurillac, de l’axe routier de la RN122 génère une pression d’urbanisation croissante (cf. Grandes composantes des paysages : une vallée agricole habitée en voie de périurbanisation..)
- Le développement d’équipements touristiques.
La demande forte de logements touristiques est liée aux tendances actuelles de tourisme vert, qui sont mises en avant dans la vallée de la Cère et plus largement dans tout le département.
- La modernisation des axes de transit.
L’importance stratégique de l’axe routier de la RN122 et de son trafic continue de générer de multiples aménagements de modernisation.
- L’enfrichement des versants.