6.03 Billomois-Comté

Ce texte est le résultat d’un agencement des choses dites par des paysagistes et leurs invités, tous embarqués dans une camionnette-voyageuse à travers l’Auvergne. Pour cet ensemble de paysages, il a été écrit à partir de tout ce qu’ils ont été capables de voir ensemble, durant les itinéraires n°20 et 29 des ateliers mobiles des paysages qui se sont tenus le 30/01/2012 et le 22/05/2012.

1. SITUATION

Le Billomois-Comté (département du Puy-de-Dôme) est le début du relief du Livradois. Il fait partie de la série dégressive d’ensembles de paysages qui va, du sud vers le nord, des plateaux du Haut-Livradois à la plaine de Limagne en passant par l’étage du Bas-Livradois et du Billomois-Comté. Les limites de l’ensemble sont relativement floues. Elles se superposent assez facilement à celles des ensembles voisins comme celui des Défilés du Val-d’Allier (9.01) et celui du Bas-Livradois (4.04) notamment dans sa partie sud. Il faut donc, pour avoir un aperçu complet de l’ensemble, lire aussi les descriptions de ces deux derniers ensembles de paysages.

Cet ensemble appartient à la famille de paysages : 6. Les Limagnes et terres de grandes cultures

Les unités de paysages qui composent cet ensemble : 6.03 A Bassin de Vic-le-Comte / 6.03 B Buttes de Saint-Julien / 6.03 C Forêts de la Comté / 6.03 D Limagne de Lignat et de Billom / 6.03 E Buttes d’Orteil / 6.03 F Buttes de Ravel et de la Mure.

2. GRANDES COMPOSANTES DES PAYSAGES

2.1 La "Limagne des buttes", un système de points de vue - points de mire.

Les deux Turlurons
Près de Billom, au moment où l’on passe de la Limagne à la "Limagne des buttes", la terre change de couleur. Le Billomois est un espace de Limagne singulier. A vingt-cinq kilomètres à l’est de Clermont-Ferrand, la ville de Billom est située au centre d’un paysage ouvert sur la Limagne, mais encore mouvementé par de nombreuses buttes volcaniques qui se rattachent à la Comté, hérissées de ruines féodales (Grand Turluron, Busséol, Coppel, Montmorin, Mauzun), ou portant des oratoires (Petit Turluron, Notre-Dame de la Roche). La densité de points de vue élevés (les buttes) dans cet ensemble de paysages génère une sorte de "dispositif de vision" particulier où chaque point haut est à la fois un point de vue vers d’autres points hauts et un point de mire depuis les autres points hauts, qui s’apparente (bien que sur un registre différent) à celui du bassin du Puy-en-Velay (cf. tableau de l’ensemble paysager 7.01 - Bassin du Puy). A la différence notoire qu’il ne s’agit pas ici d’un territoire urbain mais d’un espace essentiellement agricole.

2.2 La diversité des cultures : légumes, céréales et fruitiers.

Le Billomois depuis les contreforts du Bas-Livradois
Des champs d’ail et d’oignon côtoient des espaces de céréales, auxquels succèdent des vignes et des vergers. L’ensemble est parsemé d’alignements partiels de noyers qui se font de plus en plus rares en bordure des champs. Des cultures de noisetiers et de noyers ont été plantées par endroit, par exemple dans les pentes près de Busséol à proximité du Val-d’Allier. Les noix sont souvent des compléments pour les producteurs d’ail et d’oignon à la ferme. Du côté de Saint-Babel, un verger de pommiers sert d’entrée de village. La présence des fruitiers prend des formes qui peuvent être très disparates.

2.3 Les champs complantés du Billomois et la disparition des arbres : le noyer.
Par le passé, l’apparence du Billomois était largement dépendante de la présence importante des noyers, plantés en bord de champs et de chemins. La Limagne ressemblait alors à un « grand bois clair ». Cela, associé aux ondulations du relief et des buttes, avait tendance à susciter un rapprochement entre les paysages du billomois et ceux de la Toscane. Le 20ème siècle a vu la disparition progressive des noyers dans le paysage. A l’occasion des remembrements, on a abattu les arbres qui longeaient les champs. Autrefois, le noyer était considéré comme un bois noble et un arbre utile (huiles, noix…). Au moment d’un grand mariage, on avait coutume d’abattre un noyer pour en tirer un bénéfice qui servait à régler des frais. Les noyers étaient des réserves d’argent, des sortes de tirelires.

2.4 Les signes de proximité de l’agglomération de Clermont-Ferrand : la reconversion des vignes vers la mécanisation.

Plantation récente de vignes à proximité de Pérignat-sur-Allier
Au bord des routes, on peut voir des champs de vignes reconvertis pour une adaptation à une exploitation mécanisée : un rang sur deux a été retiré, les espaces centraux ont été engazonnés, des piquets en aluminium sont utilisés pour tutorer les ceps. L’apparence des champs de vignes "se rationalise". Une des menaces actuelles, conséquence directe du développement de l’urbanisation dans le territoire du Grand-Clermont, est que le prix de la terre des coteaux, de faible valeur agronomique, augmente trop sous la pression immobilière. Cela rend la transmission inter-générationnelle de plus en plus problématique, voire impossible. D’où un risque pour l’agriculture périurbaine future, et notamment l’activité viticole, de voir disparaître une forme de savoirs et de savoir-faire liés au sens du terroir et de l’eau.

2.5 Le massif forestier de la Comté.

Le Bois de la Comté
La forêt de la Comté est une forêt ancienne de chênes, de charmes, de tilleuls… Dans les années 60, avec le déclin de l’utilisation locale du bois pour le chauffage et sous la pression du Fonds Forestier National (F.F.N .), des enrésinements important ont eu lieu, notamment dans les forêts publiques (300 ha de plantations résineuses). Cette forêt a une très longue histoire. Au 17ème siècle, elle était considérée comme l’une des plus belles forêts de France. C’est un vestige historique progressivement grignoté par l’expansion du territoire agricole. Au-delà de sa qualité naturelle actuelle en terme de faune et de flore (habitats Natura 2000, ZNIEFF), c’est aussi le massif volcanique le plus ancien d’Auvergne. Une mission naturaliste a eu lieu entre 2008 et 2010 avec le célèbre "radeau des cimes" pour inventorier la flore et la faune, du sol de la forêt à la canopée. Une partie de la forêt a été acquise par le Conseil Général du Puy-de-Dôme en 2000 (moins de six cents hectares pour une superficie totale du massif forestier de 1500 hectares), qui en a fait un Espace Naturel Sensible (ENS). Un ENS est un site « naturel, menacé, rendu vulnérable par des perspectives d’urbanisation, de développement économique, par des risques de pollution, voire par une fréquentation touristique importante ou, au contraire, fragilisé par une absence d’entretien, un état d’abandon ». Il fait à ce titre l’objet d’une gestion particulière de préservation. Un comité de pilotage a été mis en place entre 2001 et 2003 pour définir des modalités de gestion et d’accueil du public en concertation entre autres avec les élus des communes concernées et l’Office National des Forêts (ONF). De 2003 à 2005, six aires de stationnement ont été aménagées, la maison forestière a été réhabilitée en "poste de gardiennage", un arboretum des essences locales et une mare à vocation pédagogique ont été créés, trois chemins de découverte pédagogique et une structure d’accueil du public ont vu le jour, etc. La protection et la gestion de l’ENS s’accompagnent d’une communication très importante du Conseil Général et des offices de tourisme sur ces espaces.

2.6 Le système des buttes qui bordent le Val-d’Allier.
L’ensemble de paysages du Billomois-Comté borde celui des Défilés de l’Allier à l’Ouest et partage avec lui une partie du système de buttes et petits puys qui surplombent le val d’Allier de plus ou moins près, presque toujours associés à une installation humaine (par exemple Buron, les buttes de la communes de Saint-Babel, Busséol, le Puy de Saint Romain…) (cf. Ensemble de paysages des Défilés du Val-d’Allier (9.01) : Grandes composantes des paysages, le système de buttes et de points hauts associés à des villages).

3. MOTIFS PAYSAGERS

3.1 Les alignements de noyers ou ce qu’il en reste.
Vestiges du passé, les noyers plantés dans les cultures en bordure des champs, quand ils ont été préservés, rappellent une "ambiance en voie de disparition" du Billomois : celle qui permettait un rapprochement paysager avec la Toscane italienne (cf. Grandes composantes des paysages : les champs complantés du billomois et la disparition des arbres, le noyer.).

3.2 Les espaces de fruitiers variés.
La récurrence des fruitiers sous des formes diverses doit être considérée comme un motif paysager propre à cet ensemble : plantations de noisetiers et vergers de pommiers, alignements de noyers, vignes… La culture du fruitier se retrouve jusque dans les jardins individuels… (cf. Grandes composantes des paysages : la diversité des cultures, légumes, céréales et fruitiers…).

3.3 Les buttes, surmontées ou non de châteaux ou de tours…
Cet ensemble de paysages de grandes cultures est parsemé de petits reliefs qui constituent un motif de paysages (cf. Grandes composantes des paysages : la Limagne des buttes.).

4. EXPERIENCES ET ENDROITS SINGULIERS

4.1 Les vues panoramiques depuis les nombreux points hauts, notamment sur la vallée de l’Allier et la Limagne.
La présence de multiples points hauts génère la possibilité permanente d’une vue panoramique sur les ensembles de paysages adjacents.

4.2 L’expérience des silhouettes des édifices construits sur les points hauts.
Inversement, ces multiples points hauts, surmontés pour beaucoup de constructions anciennes, génèrent une expérience récurrente de découpage de silhouettes en fonction de la lumière du jour.

4.3 Le centre ancien de Billom.
L’ensemble urbain de Billom reflète ses heures de gloire du Moyen-âge à l’époque où y fut installée une université (Cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département du Puy-de-Dôme, Diren Auvergne, 2009.).

5. CE QUI A CHANGE OU EST EN TRAIN DE CHANGER

  • La disparition quasi-achevée de la trame de noyers et le changement assez radical d’apparence du Billomois.
    (cf. Grandes composantes des paysages : les champs complantés du Billomois et la disparition des arbres, le noyer.)
  • La transformation des modes de culture liée aux modifications du foncier sous la pression de l’agglomération de Clermont-Ferrand.
    L’augmentation du prix du foncier agricole sous la pression des développements périurbains du Grand Clermont pourrait avoir pour conséquence une difficulté de transmission des modes culturaux actuels (cf. Grandes composantes des paysages : les signes de proximité de l’agglomération de Clermont-Ferrand.).
  • La fréquentation nouvelle de la forêt de la Comté.
    La forêt de la Comté devient une destination de tourisme-nature récente sous l’impulsion du Conseil Général qui en a acquis une partie en l’an 2000 (Espace Naturel Sensible) (cf. Grandes composantes des paysages : le massif forestier de la Comté).

6. VERSION IMPRIMABLE

7. PHOTOTHEQUE

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