5.06 Forêts et bocage du Val d’Allier vichyssois

Ce texte est le résultat d’un agencement des choses dites par des paysagistes et leurs invités, tous embarqués dans une camionnette-voyageuse à travers l’Auvergne. Pour cet ensemble de paysages, il a été écrit à partir de tout ce qu’ils ont été capables de voir ensemble, durant l’itinéraire n°24 des ateliers mobiles des paysages, qui a été effectué le 28/02/2012.

1. SITUATION

Cet ensemble de paysages est un léger relief en forme de bande orientée nord-sud, longue d’une trentaine de kilomètres et large de moins de dix kilomètres, qui sépare la Limagne de Gannat (6.02) du Val d’Allier (8.01) au niveau de Vichy. C’est une forme "d’îlot bocager" séparé des grandes étendues de bocage du département par deux ensembles de limagnes.

Cet ensemble appartient à la famille de paysages : 5. Le bocage

Les unités de paysages qui composent cet ensemble : 5.06 A Coteau de Randan / 5.06 B Collines de Vendègre / 5.06 C Forêts de Montpensier et de Randan / 5.06 D Vallée du Sarmon / 5.06 E Coteau de Vendat / 5.06 F Forêt de Marcenat.

2. GRANDES COMPOSANTES DES PAYSAGES

2.1 Variations bocagères.

En aval de Brugheas
L’image prédominante de l’Allier, celle de la plaine de grandes cultures de Limagne ou d’un bocage stéréotypé, est très orientée par une vision depuis les grands axes routiers. Mais l’espace est plus complexe. Le relief léger entre la plaine de Gannat et la vallée de l’Allier vers Vichy par exemple est occupé ponctuellement par un terroir mixte de cultures et d’élevage. C’est une des multiples variations du bocage dans le département de l’Allier. Il faut pouvoir identifier ces diverses variations locales du bocage actuel pour se donner les moyens d’appréhender plus efficacement les paysages de ce département. Le département de l’Allier, en termes de paysage, nécessite une attention sur les nuances, que n’implique pas toujours la lecture des paysages plus franchement différenciés des autres espaces auvergnats.
  • Une enclave bocagère. La situation de cet ensemble est très singulière en Auvergne. C’est une enclave bocagère dans un univers de limagnes et de plaine alluviale (Val d’Allier). La singularité de cette localisation a amené à différencier cet espace comme un ensemble de paysages à part entière.
  • Le rapport espace forestier (chênes et hêtres) /espace bocager différencie cet ensemble de paysages des autres ensembles de bocages de l’Allier. Les espaces forestiers sont des composantes habituelles des différents bocages de l’Allier (cf. par exemple l’ensemble Forêt et Bocage Bourbonnais 5.01). Mais dans le cas de celui du Val d’Allier Vichyssois, le rapport équilibré entre la composante forêt et la composante bocage est tel que cela devient une de ses principales caractéristiques paysagères. L’importance de l’occupation de l’espace par la forêt (entre quarante et cinquante pourcents) déforme, voire renverse, les critères perceptifs habituels du bocage.
    Le découpage forestier est relativement complexe : Forêt domaniale de Marcenat, Forêt de Montpensier, Bois Saint-Géat, Bois de Randan, Bois du Puel Chauvin, Forêt de la Boucharde… Les toponymes de bourgs ou hameaux indiquent clairement la composante culturelle forestière de ce territoire : Bois de l’Eau, Saint-Didier-la-Forêt, Villeneuve-les-Cerfs… La proximité de Vichy peut expliquer qu’une partie de ces forêts soit issue de propriétés aristocratiques.
  • La proximité de Vichy génère une "présence urbaine" dans le bocage. La composante d’urbanisation est une particularité de cet ensemble bocager. La proximité de Vichy et son influence "péri-urbaine" génère une densité et de nouvelles formes d’urbanisation qui, couplées à la présence importante de la forêt donne une image inhabituelle du territoire de bocage.
  • Forme de présence de l’eau. La caractéristique géomorphologique de l’ensemble de paysages, un léger relief allongé le long du Val d’Allier, induit une forme de présence particulière de l’eau : de très nombreux petits cours d’eau, une douzaine environ, naissent sur le relief et viennent alimenter l’Allier après un parcours qui ne dépasse que rarement les dix kilomètres. Ils sont tous orientés globalement sud-ouest/nord-est et participent d’une ambiance de légers vallons qu’illustre bien celui de Brugheas dans lequel s’écoule le Sarmon et cinq ou six de ses petits affluents. L’importance que ces mini-cours d’eau ont pu jouer dans l’histoire pour les habitants de ce territoire peut se lire dans les infrastructures anciennes d’étangs que l’on trouve dans l’espace forestier. La proximité des bois couplé à la présence des cours d’eau et à l’élevage a, par le passé, permis une grande activité de tannerie (exemple de la tannerie de Maringues et de celle de la sœur du roi Louis-Philippe au 19ème siècle sur le cours du Buron à Mons près du domaine royal de Randan).

3. MOTIFS PAYSAGERS

3.1 Le réseau des petits cours d’eau ;
Le long des cours d’eau, le chapelet d’étangs (la plupart du temps enfouis dans l’espace forestier), les diverses infrastructures maintenant discrètes d’activités anciennes dans les vallons (moulins, tanneries) sont indicatrices d’une certaine richesse de ce relief bocager-forestier à proximité directe de Vichy cf. Grandes composantes de paysages : forme de présence de l’eau.

3.2 Les infrastructures sportives.
Sur la rive gauche de l’Allier à Vichy, se sont développées les infrastructures sportives liées entre autres à la villégiature thermale (zone de l’hippodrome de Bellerive-sur-Allier). Plus à l’Ouest, les coteaux forestiers ont servi comme une sorte d’extension "naturelle" à ces infrastructures. Les forêts servaient de domaines de chasse pour les riches aristocrates et la famille royale (19ème) séjournant à Vichy. Un golf a été construit récemment au coeur de la forêt de Montpensier qui double celui plus ancien de Bellerive-d’Allier… On peut considérer cet espace forestier comme une extension en apparence plus naturelle des infrastructures sportives et des parcs de Vichy aménagés pour la clientèle thermale (exemple des parcs de l’Allier créés par Napoléon III en gagnant sur la rivière grâce à la construction d’une digue) qui « furent au premier rang de l’équipement français » (Source : guide vert du pneu Michelin, 1958).

4. EXPERIENCES ET ENDROITS SINGULIERS

4.1 Le château de Randan, son parc et le domaine royal.

Le domaine royal de Randan
Le château de Randan a été réhabilité dans les années 1820 par l’architecte néoclassique Fontaine. Il a aménagé le parc du domaine royal formé de bois, de prés, d’étangs et de landes au sein du domaine forestier de 8000 hectares (Cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département de l’Allier, Diren Auvergne, décembre 2005).

4.2 L’entrée sous la forêt du tunnel qui passe sous Lhérat.
La ligne de train qui relie Vichy à Riom entre en plaine de Limagne par une rampe et un long tunnel qui passe sous le village de Lhérat près de Randan. Le tunnel est un seuil entre la forêt et la plaine de Limagne.

5. CE QUI A CHANGE OU EST EN TRAIN DE CHANGER

  • La tendance à faire évoluer le caractère de cet espace d’élevage et de forêts par l’apparition et le développement de "formes périurbaines" standardisées : exemple des "Gated communities".
    A cinq minutes en voiture du centre du bourg de Vendat, dans le quartier de Champoux, à l’écart, un quartier résidentiel a été construit sur le modèle des « gated communities » américaines. Le terme signifie littéralement communauté fermée par des portes. L’accès y est contrôlé par un grand portail sécurisé et par des caméras de télé-surveillance. L’espace commun du quartier est privatisé. Un grillage métallique rigide, de couleur verte et de deux mètres de hauteur fait office d’infrastructure de sécurité pour éviter les intrusions.
    Le quartier nommé Le Clos de Boulaise reprend le nom d’un espace champêtre protégé et calme (le clos). Les couleurs des maisons sont de tonalités provençales.
    Le système résidentiel de "gated community" se développe de façon visible dans le département de l’Allier depuis ces dernières années. C’est une forme nouvelle d’aménagement de zones d’habitat individuel, issue d’un modèle directement importé de l’étranger : une sorte "d’immeuble horizontal", occupant plus de surface au sol. Elle est symptomatique d’une évolution des formes de sociabilité et de leur occupation du territoire. La petite agglomération de Vendat est située à une quinzaine de minutes en voiture de l’agglomération de Vichy.
    Les formes nouvelles d’aménagement de l’habitat en campagne, basées sur un modèle de reproductibilité et sur des formes de sociabilité refermées sur elles-mêmes, sont l’objet d’un film, Un monde pour soi, produit par la Fédération des Parcs Naturels Régionaux, outil de débat pour les élus et les techniciens sur l’étalement urbain et "l’entresoi" (film de 26’, réalisé par Y. Sinic et écrit par N. Combe, L’Harmattan+Fédération des Parcs naturels régionaux+Parc naturel régional du Morvan, 2010).
  • L’évolution des lisières forestières et plus généralement l’évolution de la forêt vers une forêt d’ambiance "périurbaine".
    La forêt de cet ensemble est partie prenante de l’agglomération de Vichy. La proximité urbaine lui donne une dimension particulière, où les aménagements forestiers côtoient les infrastructures qui accompagnent le développement urbain. Aujourd’hui, le développement résidentiel et celui des infrastructures routières avec notamment le projet de contournement de Vichy accélèrent l’évolution d’apparence et d’occupation des contours de la forêt, en modifient les espaces de lisières.
  • La voie de contournement de Vichy.
    L’ensemble des forêts et bocages du Val d’Allier Vichyssois est entièrement concerné par le projet de contournement de l’agglomération vichyssoise. La voie de contournement traversera la quasi totalité des cours d’eau et la plupart des espaces boisés qui constituent les composantes de l’ensemble de paysages dont pour grande part la Forêt de Montpensier. La construction de cette voie, associée aux développements connexes qui l’accompagneront comme lors de toute construction d’infrastructure nouvelle de ce genre, aura donc un impact décisif sur l’avenir et le sens paysager de l’ensemble.
  • La perte de visibilité du système hydraulique, des étangs et cours d’eau des vallons forestiers ou habités.
    Deux phénomènes concourent à rendre le système hydraulique des étangs et cours d’eau de moins en moins perceptible : la localisation d’un certain nombre d’étangs dans les forêts et l’urbanisation progressive des vallons.

6. VERSION IMPRIMABLE

7. PHOTOTHEQUE

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