Ubac et fond du berceau Tarin

Département  : Savoie
 
Communes  : BELLENTRE, CHAMPAGNY-EN-VANOISE, LANDRY, PEISEY-NANCROIX, SALINS-LES-THERMES, AIME, BOZEL, FEISSONS-SUR-SALINS, MONTAGNY, MONTGIROD, MOUTIERS, NOTRE-DAME-DU-PRE, SAINT-MARCEL, BOURG-SAINT-MAURICE, LES CHAPELLES, LA COTE-D’AIME, SEEZ, VALEZAN, VILLAROGER, MACOT-LA-PLAGNE
 
Famille de paysages : Paysages naturels de loisirs
 
Surface (Ha) : 20170
 
Carte(s) IGN :

Impression générale

A la sortie de Moûtiers, la route d’Aime et de Bourg-Saint-Maurice grimpe entre des à pics, atteint l’étroit de Saix (1) puis le verrou de Villette, le saut de la pucelle (2), jusqu’à ce que, peu avant Aime, les défilés et barrières rocheuses laissent enfin place à un paysage plus ample (3). En fond de vallée, l’Isère, la route nationale, la voie ferrée et la piste cyclable s’entremêlent (4).La vallée s’ouvre et s’élargit progressivement jusqu’à Bourg-Saint-Maurice. On peut alors prendre du recul sur l’ubac (5) du berceau tarin occupé par de vastes forêts traversées de nombreux torrents (6). Les sommets du Mont Jovet, du Roc du Bécoin, de la roche de Mio, de Bellecote, et l’Aiguille du Saint-Esprit apparaissent alors.En empruntant de longues routes à lacets (7), on pourra découvrir depuis Aime, la station de La Plagne (8) ou la vallée de Peisey-Nancroix (9, 10), et depuis Bourg-Saint-Maurice, la célèbre station des Arcs (11).

Identification

L’ubac et le fond du berceau tarin sont délimités par le resserrement du relief au niveau de Moûtiers à l’ouest (1) ; la crête dominée par le Mont Jovet (2558 mètres), le Roc du Bécoin (2592 mètres), la roche de Mio (2739 mètres), le sommet de Bellecote (3417 mètres) et l’Aiguille du Saint-Esprit (3419 mètres) au sud ; le pied de l’adret au nord (2), la crête allant de l’Aiguille du Saint-Esprit à Bourg-Saint-Maurice à l’est (3).Cette partie de la vallée de l’Isère concentre torrent (4), voie nationale (5), voie ferrée (6), piste cyclable et la petite ville de Aime. Sur l’ubac, au niveau de Landry, une vallée très étroite et entaillée (7) mène vers Peisey-Nancroix et le cœur du massif de la Vanoise. Au niveau d’Aime et de Bourg-Saint-Maurice, de part et d’autre de la vallée de Peisey-Nancroix, des routes partent vers les replats et petites vallées perchées où se sont installées les stations de La Plagne et des Arcs. La partie de versant surplombant la séquence d’étroits est très raide et accueille des hameaux encore préservés car très difficiles d’accès.Entre Aime et Bourg-Saint-Maurice, les pentes douces du fond de vallée ont permis l’installation de pâtures et de prairies ainsi que la plantation de vastes vergers de pommiers à hautes tiges (8) (quelques poiriers et noyers également). Bénéficiant de tailles d’entretien et localement de replantations, ces vergers constituent un élément remarquable du paysage de la vallée. On peut également observer des vestiges de murets (9) de pierres visant à amoindrir la pente des pâtures.L’ubac est extrêmement boisé (10) (frênes, bouleaux en fond de vallée, hêtres et sapins jusqu’à 1500 mètres, puis pins à crochets, pins cembro et mélèzes au delà). Peu ensoleillé, froid et humide, ce versant est peu habité en basse altitude. Ce n’est qu’à partir de 1600 mètres que les stations intégrées de La Plagne et des Arcs se sont installées pour profiter de l’enneigement et des magnifiques vues sur le Mont Blanc (11).Les maisons traditionnelles se situent plutôt en fond de vallée ou dans les hameaux de la vallée de Peisey-Nancroix. A Aime les maisons de bourg, d’influence sarde, enduites de couleurs ocres (12) sont remarquables. Dans les hameaux de la vallée de Peisey-Nancroix, l’architecture des maisons se caractérise par des pignons ouverts en sous pente, des enduis de chaux blanche, des murs de schistes, des toitures en Lauzes et des charpentes en bois apparentes (13).

Qualification

L’économie locale de la vallée, de l’ubac et du fond du berceau tarin est liée en très grande partie au tourisme. Cette vallée est celle de « l’or blanc ». Les deux principales stations de sports d’hiver que sont Les Arcs (1) et La Plagne (2) attirent en effet des touristes à l’échelle nationale et internationale. Il faut dire que le domaine « Paradiski » qui relie les deux domaines skiables par le plus grand téléphérique du monde nommé « Vanoise Express » (3) compte 425 Km de pistes et 160 remontées mécaniques (4) .Les Arcs possèdent plus de 30 000 lits et La Plagne 50 000 lits.La station des Arcs fait partie de l’histoire de l’architecture moderne. Conçue par une équipe d’architectes menée par l’Atelier d’Architecture en Montagne, et comprenant Charlotte Perriand célèbre collaboratrice du Corbusier, elle fait partie des stations dites « intégrées ». C’est à dire des stations développées par un seul promoteur (Roger Godino), une seule équipe d’architectes, une collectivité locale qui concédait l’exclusivité de l’aménagement, et les services de l’État qui contrôlaient le projet. Les principes de la première opération, Arc 1600, conçu en 1968, sont les suivants : les vieux chalets d’alpage existants sont conservés (5), les voitures sont laissées au pied de la station, les immeubles se regroupent autour de la grenouillère, espace où convergent les pistes, les immeubles sont implantés « en cascade » (6), autrement dit, perpendiculairement à l’axe général de la station et suivant la pente par des changements de niveaux successifs pour préserver les vues sur le paysage lointain.L’architecture des bâtiments est résolument moderne et cherche la lumière et le soleil (7) (larges baies vitrées, duplex, cuisines ouvertes…) et ne cherche pas à imiter l’architecture vernaculaire bien qu’elle en reprenne le matériau principal : le bois local de mélèze et de sapin. Suivant le modèle de cette première station, viendront ensuite « Arc 1800 » construit en 1974 et « Arc 2000 » en 1979. Enfin en 2003 est construite, par un promoteur canadien (Intrawest), Arc 1950, cette fois-ci selon une référence néo-traditionnelle, certains parleront de « disneylandisation »…La station de La Plagne fait également partie de l’aventure expérimentale des stations intégrées. Le promoteur est cette fois Robert Legoux, et l’architecte-urbaniste, Michel Bezançon. La Plagne est composée de 10 sites dont trois réalisations seulement répondent aux critères des stations intégrées précédemment cités. Construites entre 1960 et 1975, La « Plagne Centre », « Aime 2000 » et « Plagne Bellecôte » répondent aux canons de l’architecture moderne initiés par l’école de Courchevel : toits papillons (8) ou à pentes uniques, larges baies vitrés, balcon ensoleillés… Aime 2000 est marquée par le « paquebot des neiges » (9) : un bâtiment unique de 2500 lits qui comprend une galerie commerçante pour libérer l’espace au sol. Les réalisations suivantes, de Montchavin à « Plagne 1800 » adoptent le modèle de la station-village où le style néo-traditionnel domine (10).Mais outre les stations de sports d’hiver, l’ubac et le fond du berceau tarin sont aussi connus pour leurs églises Baroques (à Aime, Landry, Peisey-Nancroix), pour la chapelle Saint Jacques à Saint-Marcel dressée sur le Roc Pupin (11) (site inscrit) et pour les édifices remarquables de la petite ville d’Aime, notamment la Basilique Saint-Martin (12) bâtie vers 1010 et la tour de Montmayeur (13) construite au XIIIe siècle.

Transformation

Les principales transformations qui touchent le paysage de l’ubac et du fond du berceau tarin sont dues au développement des domaines skiables et à l’urbanisation des stations de sports d’hiver (1, 2, 3). Depuis 1975, la station de la Plagne s’est énormément étendue, son développement s’est fait sous la forme de pôles urbains construits à différentes époques. Aujourd’hui on compte une petite dizaine de pôles autour de la station initiale. Les derniers pôles en date se construisent suivant un urbanisme singeant les stations villages et dans le style architectural néo-traditionnel. La station a perdu en partie son esprit originel.Aux Arcs, il en va de même : la station continue depuis peu son développement mais d’une façon très éloignée des principes pionniers. Il faut dire que le départ en 1990 du fondateur des Arcs a morcelé la gestion de la station entre plusieurs partenaires, fragilisant le maintien de l’exceptionnelle cohérence architecturale et urbaine qui a fait des Arcs un repère essentiel dans l’évolution de l’aménagement en montagne au XXe siècle.Un autre phénomène, financier, modifie ou risque de modifier le paysage. La pression économique liée au prix de vente très élevé des terrains à vocation de construction en station de ski menace l’avenir des alpages.Le développement des stations s’accompagne inévitablement du développement des domaines skiables aux dépens des zones naturelles (4). En effet, certains milieux sont particulièrement vulnérables à certains aménagements comme les remontées mécaniques et les pistes de ski (5). C’est par exemple le cas de la Cembraie de La Plagne où les jeunes pins, à peine recouverts par la neige, sont mutilés par les carres coupantes des skieurs hors-piste, et où la pérennité de la forêt est par conséquent compromise.La carrière de Centron (6) marque fortement le paysage depuis la RN90, mais aussi depuis les versants.

Objectifs de qualité paysagère

Lorsqu’ils partent en vacances aux Arcs ou à La Plagne, les touristes recherchent avant tout les kilomètres de pistes de ski, du confort et des infrastructures d’accueil, voire un beau paysage. En terme de qualité paysagère, l’objectif est donc de concilier ces demandes qui peuvent facilement s’avérer incompatibles.Pour permettre un développement touristique sans pour autant porter atteinte au paysage plusieurs objectifs sont à viser :- Penser le développement de la voirie en cohérence avec le paysage et ne pas aller vers des aménagements routiers déconnectés de leur environnement (1).- Ne pas développer les domaines skiables aux dépens des zones naturelles et penser à l’impact visuel des infrastructures telles que les remontées mécaniques, canons à neige, retenues d’altitude (2) au moment de leur implantation, ou les pistes de ski lors de leur remodelage.- Favoriser dans les stations des formes d’aménagement économes en ressources et respectant les principes fondateurs des stations. Favoriser la rénovation et l’entretien des bâtis existants afin d’amoindrir la nécessité de construire du neuf.- Améliorer la prise en compte des enjeux naturalistes et paysagers dans les aménagements et les activités de loisirs, y compris pour les activités d’été.- Soutenir une sylviculture et une filière bois dans les basses altitudes du versant ubac pour éviter un reboisement trop important (3).

Partager la page

Sur le même sujet