5.05 Bocage des Basses Marches du Bourbonnais
Ce texte est le résultat d’un agencement des choses dites par des paysagistes et leurs invités, tous embarqués dans une camionnette-voyageuse à travers l’Auvergne. Pour cet ensemble de paysages, il a été écrit à partir de tout ce qu’ils ont été capables de voir ensemble, durant l’itinéraire n°23 des ateliers mobiles des paysages, qui a été effectué le 27/02/2012.
1. SITUATION
Cet ensemble de paysages se situe à l’extrême est du département de l’Allier. Il est encadré par la vallée de la Besbre (9.11) à l’ouest, par la Loire Bourbonnaise (8.02) au nord et à l’est, et par la Montagne Bourbonnaise (2.01) au sud. C’est l’endroit où se termine le Massif Central dans l’Auvergne du nord-est.
Cet ensemble appartient à la famille de paysages : 5. Le bocage
Les unités de paysages qui composent cet ensemble : 5.05 A Collines du Donjon / 5.05 B Collines de Montcombroux-les-Mines / 5.05 C Plateau du Bouchaud / 5.05 D Collines de Barrais-Bussolles / 5.05 E Collines de Saligny / 5.05 F Côtes de Molinet / 5.05 G Côtes de Luneau.
2. GRANDES COMPOSANTES DES PAYSAGES
2.1 Les cultures céréalières mélangées aux prairies d’élevage sur le plateau qui borde la vallée de la Besbre.
2.2 De manière plus générale, le plateau vallonné des Basses Marches est un bocage parsemé d’arbres isolés et de bois.
2.3 Une "montagne isolée" : le Puy-Saint-Ambroise.
2.4 La couleur du grès.
2.5 Au-delà du bocage, les signes d’une ambiance locale de "France photographiable par Raymond Depardon".
Au-delà de l’apparence générale des paysages du bocage des Basses Marches Bourbonnaises, c’est peut-être au travers de certains signes ponctuels mais répétés que l’on peut saisir une certaine qualité d’ambiance, notamment celle qui correspond à ces territoires rencontrés en Auvergne, relativement à l’écart des grands axes de circulation, et où n’ont pas encore disparu les éléments ordinaires qui composaient le cadre de vie des anciens. Sur ces éléments toujours en place se sont ajoutés certains plus récents sans pour autant les faire disparaître. Ce sont ces confrontations répétées de petits éléments ordinaires anciens et nouveaux qui donnent à cet espace de bocage vallonné un air de "France photographiable par Raymond Depardon". Cela crée dans le territoire des situations d’accumulation parfois non dénuées d’étrangeté qui peuvent être considérées comme des motifs de paysage. En voici quelques exemples :
- Les chemins d’anciennes voies ferrées.
Depuis Chavroches, en arrivant à Sorbier, la route croise perpendiculairement l’ancienne voie de chemin de fer démantelée. D’un côté, elle a été reconvertie en chemin d’exploitation agricole. Elle traverse un talus en déblai avec des murs de soutènement. C’est une entrée de champ peu habituelle. De l’autre côté de la route, elle a été reconvertie en voie d’accès à un parking qui a été construit sur son tracé.Ancienne voie ferrée depuis Chavroches en arrivant à Sorbier - Les panneaux devant les volets.
Près de la place de l’église du Donjon, à l’intersection des routes départementales 994 et 989, des panneaux d’orientation (routière) ont été installés devant les fenêtres d’une maison au premier étage, au-dessus de la supérette. Les volets sont fermés. Dix panneaux disposés en deux séries verticales. Sur le trottoir, devant la porte d’entrée de la maison, huit autres panneaux d’orientation (de services) ont été installés sous forme de deux autres séries verticales.Affichage directionnel sur les façades du centre-bourg du Donjon - Panneaux d’information à affichage électronique.
Un panneau d’information électronique a été installé sur la place de l’église du Donjon, sur un poteau à quatre mètres de hauteur. Le modèle de panneau très urbain surprend dans l’univers de la place. Par sécurité, un aménagement urbain a été réalisé autour du pilier qui soutient le panneau d’information. Un muret construit en enclos d’une cinquantaine de centimètres de hauteur constitue une première protection. Des barrières et plots métalliques « anti-voitures » peints en vert constituent un deuxième enclos autour du premier. Entre les deux, une poubelle urbaine a été installée.
A quelques mètres, un autre assemblage constitue un aménagement un peu plus ancien : un petit bâtiment de toilettes publiques a été construit au pied d’un poteau électrique sur le trottoir. Une borne incendie et de nombreux panneaux l’entourent. Un bac de poubelle mobile est calé dans un espace résiduel entre les panneaux, la construction et le poteau.
L’aménagement plus ancien qui accumule des éléments fonctionnels est un procédé d’aménagement utilisé pour éviter leur trop grande dispersion dans l’espace public. L’accumulation d’éléments de protection du premier est une forme plus récente d’aménagement qui ne relève pas de la même logique. - Accumulation autour d’une croix de campagne.
A l’intersection de la RD989 et de la RD169, une croix montée sur un piédestal rouge a été installée au croisement de deux routes importantes dans la campagne. Si originellement, à la période de christianisation des campagnes, des croix ont été installées aux carrefours des chemins parce que les croyances populaires situaient ces lieux comme étant des lieux de rendez-vous avec le diable et que l’église a voulu étendre sa protection à ces carrefours, elles sont devenues au fil du temps des points de repère évidents pour les populations rurales. Plus récemment, deux panneaux doubles d’orientation routière et un panneau de signalisation ont été installés sur le même terre-plein au niveau du croisement. Les deux techniques symboliques de signalisation s’accumulent et se superposent sur le même espace sans conserver de lien. L’une a une composante religieuse. L’autre a une composante sécuritaire.
3. MOTIFS PAYSAGERS
3.1 Les éléments du bocage.
Les éléments classiques qui constituent le bocage sont les motifs paysagers ordinaires de cet ensemble de paysages : les bouchures taillées basses surmontées de quelques chênes ; les arbres isolés et les mares…
3.2 Les petits vallons.
Le plateau est parsemé de petits vallons qui constituent l’une des particularités de l’ensemble de paysage.
3.3 Les accumulations de campagne.
(cf. Grandes composantes de paysages : les signes d’une ambiance locale de "France photographiable par Raymond Depardon")
4. EXPERIENCES ET ENDROITS SINGULIERS
4.1 Le Puy-Saint-Ambroise.
Cf. Marlin C., Pernet A., Analyse et bilan de la politique des sites protégés dans le département de l’Allier, Diren Auvergne, décembre 2005
4.2 Montcombroux-les-Mines.
C’est un exemple d’organisation spatiale d’une petite bourgade minière pour laquelle le relief a joué un rôle déterminant et qui aujourd’hui, après l’arrêt des mines, restitue de différentes façons les signes de mémoire du passé.
- Le « Village-rue ». Le bourg installé sur une crête est un "village-rue". Les maisons sont alignées, jumelées au bord de la voie quasi unique qui le traverse.
- Un alignement de maisons mitoyennes. En descendant sur la D213, un peu à l’écart du bourg, dans un vallon agréable, trois grosses maisons de maîtres avaient été construites en alignement. Chaque maison est divisée en deux habitations mitoyennes.
- L’aire de pique-nique mémorial. Une aire de pique-nique d’un genre particulier a été aménagée à l’entrée du bourg. Des tables de pique-nique en bois et des poubelles ont été installées. L’endroit est protégé du vent par une rangée de grands conifères. Un peu plus loin, une table de ping-pong d’extérieur, des balançoires et un terrain de tennis. L’allée est bordée de Prunus à fleurs. En premier plan de ces installations, un espace triangulaire délimité par une haie basse a été aménagé avec des éléments qui rappellent la mémoire de l’activité minière locale : un wagonnet sur des rails, un mini chevalet de mine… Une cabane de jardin en bois a été installée pour servir d’accueil et de pièce d’exposition. Un banc domine la scène du "jardin de mémoire". L’aménagement-mémorial sert « d’entrée de bourg ».
4.3 Les routes qui traversent le plateau sur des crêtes panoramiques.
C’est le cas par exemple de la route départementale 989 en direction de Montcombroux-les-Mines.
5. CE QUI A CHANGE OU EST EN TRAIN DE CHANGER
- Les pavillons des années 1970-1980 à Saint-Léon. A Saint-Léon, beaucoup de pavillons ont été construits dans les années 1970 et 1980. L’apparence de la commune en a été marquée fortement. Ses zones construites sont très distendues. L’entrée du lotissement du Moulin à vent est bordé de haies de thuyas qui délimitent les jardins des habitants. La vue panoramique que l’on a de la commune en prenant un peu de recul montre la présence importante de conifères au niveau des zones d’habitations et du cimetière. L’image générée par ce motif paysager que constitue le couple habitat pavillonnaire / thuyas s’est substituée à une image plus ancienne du bourg. C’est un exemple de transformation ordinaire mais radicale de l’image des bourgs de campagne en paysage urbanisé moderne que l’on considèrera peut-être un jour comme un héritage des années 1980.