La Meije et la vallée du Vénéon

05 La Meije et la vallee du Veneon
Département  : Isère
 
Communes  : LE PERIER, LE BOURG-D’OISANS, VILLARD-NOTRE-DAME, VALJOUFFREY, MONT-DE-LANS, SAINT-CHRISTOPHE-EN-OISANS, VENOSC, CHANTELOUVE
 
Famille de paysages : Paysages naturels
 
Surface (Ha) : 29706
 
Carte(s) IGN : TOP25 : 3436 ET

Impression générale

Les mots sont bien impuissants à décrire la force de ce somptueux paysage de montagne. Pour le simple randonneur qui s’aventure ici, il peut s’avérer impressionnant. Les noms des sommets font tourner la tête, du Rateau à l’Olan puis à la Roche de la Muzelle, c’est une succession de crêtes, têtes, cimes, aiguilles. Elles offrent aux yeux du promeneur des vues de beautés minérales et glaciaires. La montagne invite aussi l’alpiniste à la défier, avec des courses mythiques pour les plus chevronnés. La Meije (3983 mètres) est un endroit réputé dont la notoriété dépasse le cadre régional ; pour la petite histoire, sa première ascension remonte à 1877 ! Il est encore aujourd’hui l’un des sommets les plus difficiles des Alpes car il n’existe pas d’itinéraire « facile ». La route chemine le long du Vénéon, un gros torrent de montagne au lit capricieux, qui prend sa source dans les glaciers des Ecrins et qui se jette dans la Romanche. Partie de 700 mètres d’altitude, cette route en lacets termine sa course à la Bérarde, un hameau niché à 1700 mètres. On aura croisé seulement deux villages, Vénosc et Saint–Christophe en Oisans, et quelques rares hameaux. La présence humaine se concentre finalement dans les nombreux refuges, dont certains sont des parties intégrantes du patrimoine de montagne. Ici, la nature domine, impose sa loi et nous ramène à une humilité salutaire.

Identification

La bordure sud de la vallée du Vénéon est marquée par le Pic de l’Olan (3504 m), celle du nord par la Meije (3983 m). La géologie alpine révèle la structure du paysage, dont la lisibilité est nette. D’un seul coup d’œil, on saisit tous les étages de la vallée montagnarde : le torrent de fond de vallée, les étages boisées, une végétation éparse puis les pierres et enfin les glaciers et neiges éternelles. Autre perception, celle du vis-à-vis sur l’autre versant dès que l’on monte par un chemin ; en fond de vallée, les méandres du torrent ; en face, un autre versant de montagne. Trois éléments composent ce territoire, totalement dominé par la haute montagne : eau, pierre, végétation. L’eau, la neige, la glace sont omniprésentes : torrents, cascades naturelles, coulées, lacs, et glaciers. Cette eau de montagne pure colore le Vénéon d’un bleu acier opaque. Les altitudes des sommets sont comprises entre 2600 et 3600 mètres, ce qui explique la présence de neiges éternelles. Quand elles ne sont pas parées de blancs, les hauteurs sont minérales. Les crêtes et aiguilles en dentelles alternent avec des sommes plus ronds, des têtes et des monts. Mais, toujours, la pierre domine et maquille le paysage. Sur les hauteurs, les éboulis strient les flancs des montagnes. Dans le fond de vallée du Vénéon, de gros blocs de pierre qui n’ont pas encore été travaillés par l’eau. La pierre se retrouve aussi comme matériau pour les habitations et la route qui a été tracée pour rejoindre La Bérarde. L’habitat est composé de volumes simples, qui épousent les reliefs, avec des granges à foin qui témoignent de l’activité pastorale. A part la micro-centrale et quelques gîtes ruraux, l’habitat est quasi inexistant en fond de vallée. Outre l’habitat des quelques villages et hameaux de taille réduite(105 habitants à St Christophe en Oisans), on croise quelques gîtes touristiques tandis que les alpinistes fréquentent les refuges de montagne.Dans ce paysage un peu inhospitalier, la végétation se soumet aussi aux règles imposées par le dénivelé abrupt et rapide et par l’effet de versant. Des saules et des aulnes bordent les rivières ; le bouleau parvient à pousser dans les éboulis, autrefois utiles au fourrage et à la litière des bêtes, les frênes côtoient les habitations. Epicéas et hêtres remontent les pentes et colonisent aussi les espaces ouverts pour laisser la place ensuite aux prairies alpines qui se raréfiaient ensuite dans les pierriers.

Qualification

La notion de « paysages naturels » prend tout son sens, ici. D’ailleurs, la quasi-totalité de l’unité appartient au du Parc national des Ecrins, à cheval sur le département voisin Hautes-Alpes. Une vingtaine de sites inscrits très divers, s’égrainent sur l’ensemble de la vallée du Vénéon (cascades, hameaux, refuges, et sommets, la Meije, tête de la Maye, plan du Carrelet). Nature, beauté, intégrité, classent ce paysage à part. La route RD530 dite « de la Bérarde » s’impose comme unique itinéraire de découverte routier, et se termine en impasse dans ce hameau. En revanche, de nombreux chemins de randonnées, partis du fond de la vallée du Vénéon, empruntent les vallons transverses, et s’élèvent pour se transformer ensuite en voies d’alpinisme. Les vues s’ouvrent au rythme de l’ascension, en haut c’est l’immensité des Ecrins qui se découvre par beau temps. On aura parcouru quelque 1000 mètres de dénivelé et bénéficié progressivement de la vue magnifique sur la barre des Ecrins. Depuis le bas, l’effet de cirque est perceptible même si l’altitude est insuffisante pour embrasser tous les hauts sommets et les glaciers d’un seul regard. Ici, la beauté prestigieuse des lieux rompt avec un cadre de vie quotidien, elle en impose, pourrait-on dire. Les gens rencontrés ici, viennent ici braver la montagne ou se vider la tête, oublier le quotidien…Les paysages de la vallée du Vénéon et la Meije constituent l’un des fleurons des paysages montagnards isérois. Par leur singularité et leur intégrité, ils participent à la diversité des paysages isérois. Fort heureusement, les stations de sports d’hiver des 2 Alpes et de La Grave, sont pratiquement imperceptibles bien que contiguës, car elles se déversent sur l’autre versant.

Transformation

Pour son image de nature grandiose et de site préservé, ce paysage a une grande valeur. Ses éléments de transformation sont essentiellement d’ordre naturel. S’agissant d’un domaine de montagnes, l’érosion joue un rôle majeur, avec son lot de conséquences : éboulements, coulées, chutes d’arbres, fonte des glaciers, … Sur un plan humain, les ruines dans les hameaux sont des témoins historiques d’une activité pastorale plus intense saisonnière avec des transhumances vers les alpages. La rudesse des lieux et des conditions de vie a entraîné la désertification de ce territoire, aujourd’hui couru par les alpinistes. La fréquentation touristique ne s’est jamais essoufflée et sans atteindre des volumes trop importants vu le caractère difficile des courses. On note cependant une croissance continue de la fréquentation touristique, qui est concentrée au mois de juillet et d’août. Le camping et le caravaning restent limités au camping de la Bérarde ; un grand parking a été aménagé pour accueillir les véhicules et camping cars l’été. La centrale hydroélectrique, et le téléphérique de Vénosc qui permet de rejoindre les 2 Alpes, sont les 2 témoins les plus importants des modifications engendrées par l’homme. La route qui mène à La Bérarde figure comme exemple de rénovation ayant pris en considération les questions patrimoniales et paysagères (parapet de pierre, gravillons sur le revêtement).

Objectifs de qualité paysagère

La préservation du caractère naturel de cette unité paysagère est évidemment essentielle. Faudrait-il aller jusqu’à travailler pour le classement de certains sites ? La protection de la Meije par le Parc national est un point rassurant.La gestion du tourisme et de ses effets (besoins d’hébergement notamment) est un objectif majeur. Le développement de l’activité touristique est un point difficile, en raison des conditions : manque de place, risques naturels… Les projets et transformations envisagées font craindre pour l’intégrité paysagère, les installations à la Bérarde (parkings, etc) doivent être conduites avec discernement.La question des refuges, un point d’actualité, est déterminante : comment répondre aux nécessaires impératifs de sécurité et de confort tout en conservant leur caractère patrimonial ? On songe notamment au Refuge de l’aigle sur le versant nord de la Meije et au Refuge du Promontoire, sites historiques et pittoresques. Les questions qui se cristallisent aujourd’hui autour de leur développement sont emblématiques de la problématique générale de cette unité paysagère : comment accompagner les projets et les doter d’impératifs de qualité ? Il n’y a pas de réponse évidente, mais une nécessité de débat par les différentes parties concernées, pour considérer ces questions dans le respect du paysage. Pour que cette nature reste visible et pour conserver ce rapport de modestie de la présence humaine par rapport à la majesté des lieux !

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