Complexes de l’Alpes d’Huez et des Deux-Alpes

006 Complexes de l Alpes d Huez et des Deux Alpes
Département  : Isère
 
Communes  : CLAVANS-EN-HAUT-OISANS, HUEZ, OZ, VAUJANY, AURIS, LE FRENEY-D’OISANS, LA GARDE, MIZOEN, SAINT-SORLIN-D’ARVES, MONT-DE-LANS, SAINT-CHRISTOPHE-EN-OISANS, VENOSC, VILLARD-RECULAS
 
Famille de paysages : Paysages naturels de loisirs
 
Surface (Ha) : 12795
 
Carte(s) IGN : Top 25 : 3336 ET, 3335 ET

Impression générale

Pas moins de 4 stations de ski alpin, dont les deux plus grosses stations iséroises : l’Alpe d’Huez et les Deux Alpes. Elles bénéficient d’un emplacement privilégié, avec des vues sur les sommets alpins de toute beauté. Stations créées ex-nihilo et non dans un village alpin traditionnel, elles sont représentatives de cette génération de stations très aménagées où la fonctionnalité prime. Très fréquentées l’hiver, elles offrent en été un visage tout différent ; le calme et les installations inusitées peuvent déranger, malgré l’effort des stations pour dynamiser les pratiques estivales.Les images, les impressions et les ambiances varient donc considérablement selon les saisons. La fréquentation des stations varie au gré des événements et notamment lors du tour de France cycliste, avec l’ascension mythique de la route jusqu’à l’Alpe d’Huez. Un événement qui laisse sa trace dans le paysage puisque le goudron est bariolé de couleurs et des noms de coureurs légendaires, et ne laisse pas insensible même lorsque l’on ne s’intéresse pas à la petite reine.

Identification

Ce territoire mêle la naturalité et l’occupation de l’espace à des fins de loisirs, avec 4 stations de sports d’hiver, les Deux Alpes au sud, l’Alpe d’Huez et Auris en Oisans au centre, Vaujany au nord. Les Gorges de l’Infernet, et la partie nord du massif des Grandes Rousses font figure de haute montagne préservée des équipements.La station des 2 Alpes monte jusqu’au l’un des plus grands glaciers d’Europe : le glacier du mont de Lans à plus de 3300 mètres, d’où une ouverture plus large que sa voisine avec la pratique du ski d’été. L’Alpe d’Huez (altitude de 1860 m) se vante d’offrir la plus longue piste d’Europe !Au sein des Grandes Rousses, sur un balcon de roches roses compris entre 2000 et 2500 mètres, s’étale une ligne de lacs (lac Blanc, lac du Milieu et lac de la Fare, lac Besson, lac Faucille et lac Carrelet).Etiré entre une altitude moyenne de 900 mètres et les 3468 mètres du Pic de l’Étendard, le massif des Grandes Rousses présente l’étagement alpin caractéristique : l’étage boisé, avec des hêtres, épicéas et pins, l’étage de l’alpage avec ses vertes pelouses alpines, l’étage nival avec les sommets arides et les neiges éternelles.

Qualification

Deux sites sont classés depuis 1991 : le plan des Cavalles (1157 hectares) et les Lacs des Petites Rousses, une protection qui fait pendant à l’exploitation de la montagne dévolue à la station alpine voisine. L’Alpe d’Huez est une des plus anciennes stations de ski alpin. Créée dans les années 1920, elle a vu l’installation de la première remontée mécanique de type téléski en 1936 ! Mais, à la faveur de l’engouement pour le ski dans les années 1950, elle a été recomposée pour devenir, comme sa voisine des Deux Alpes, une station dite nouvelle. Sa conception est toute différente des stations traditionnelles qui se développaient autour d’un noyau villageois. Il en résulte une physionomie hétéroclite d’hébergements collectifs de différentes générations que viennent compléter, de manière plus récente, des chalets privés. Les constructions cohabitent et le manque de cohérence globale crée une confusion qui laisse perplexe. Cette perception se renforce en été puisque l’ambiance hivernale diffère totalement de la vision estivale. Tout a changé : les couleurs, les affluences, les usages,… La fréquentation hivernale est liée aux équipements, avec le « masque de beauté » que représente la neige. Par contraste, la perception estivale donne l’impression d’un décalage, avec une montagne truffée d’équipements inutilisés. Cependant, l’été est sur les routes un paradis pour les cyclistes avec, en point d’orgue, les fameuses montées du Tour de France. L’ascension de l’Alpe d’Huez, étape régulière de la compétition, crée l’événement. Cette route griffée des noms de coureurs et gloires du cyclisme est un paysage à part entière, un patrimoine un peu singulier.

Transformation

Quand un paysage naturel devient artificiel, par l’effet des équipements de loisirs, les marqueurs paysagers sont brouillés.Aujourd’hui terrain de jeu des 4*4 et des VTT, les pistes de montagne sont malmenées, malgré les efforts des communes et associations pour laisser des espaces pour le pâturage ; les bêtes se retrouvent à brouter sous les pylônes des remontées mécaniques. Les équipements et les habitats collectifs grignotent sans cesse du terrain, dans un irrépressible mouvement que rien ne semble pouvoir freiner. A l’Alpe d’Huez par exemple, la station, d’abord contenue derrière la route, l’a maintenant enjambée et les immeubles colonisent les espaces. La terre est griffée, tourmentée et remodelée, remblais et chemins d’accès recomposent sans cesse l’ensemble. Plus haut, la montagne est hérissée des pylônes des remontées mécaniques. Cernés, les lacs offrent en arrière plan la vision d’un téléski, d’une cabine de pisteurs. Avec les aléas climatiques, les stations investissent dans les canons à neige, et pour les alimenter creusent des retenues d’eau qu’elles bâchent de plastique pour assurer leur imperméabilité. Cette course en avant gagne aussi les petites stations. Grâce à l’argent rapporté par les barrages de Grand’Maison et du Verney, la commune de Vaujany est devenue dans les années 1980 une station de sports d’hiver, aujourd’hui reliée au domaine de l’Alpe d’Huez par téléphérique. Auris a trouvé un équilibre d’occupation de l’espace plus harmonieux ; les toits en terrasse épousent les reliefs, les lignes des immeubles gardent un effet de pente.

Objectifs de qualité paysagère

Paysage récent, objet de bouleversements rapides, il n’a pas bénéficié de toute l’attention nécessaire alors que les moyens le permettaient. Tout a été surdimensionné pour gérer de gros flux ponctuels, la forte valeur économique a nourri une conquête de l’espace démesurée. On fabrique des retenues d’altitude (lacs artificiels) pour alimenter des canons à neige, qui, eux-mêmes, hérissent les pentes de leurs pics métalliques. On en construit toujours plus dans un contexte de réchauffement climatique !Les équipements de loisirs profitent de l’espace et des trésors naturels, lesquels sont bien peu pris en considération. Un décalage encore plus choquant sur le plan des questions liées au développement durable. Elles s’envisagent encore comme un bras de fer « protection de l’environnement » contre « considérations économiques ».Une réflexion profonde par l’entrée paysagère pourrait renouveler les valeurs attribuées à ce paysage et donner des pistes de réponse aux nombreuses interrogations. Comment contenir ce qu’il faut bien appeler une cacophonie architecturale ? Comment limiter les signes de modernité urbains (publicités, boutiques, signalisations) dans les stations ? Comment restreindre les infrastructures gourmandes en place mais sous-utilisées ? Comment anticiper la mutation des stations, dont l’enneigement est en décroissance, et la reconversion des équipements ? Le glacier des Deux Alpes est en régression depuis une vingtaine d’années, ce qui pourrait conduire à remettre en cause l’ouverture du ski l’été. La recherche de la réversibilité est un objectif important.

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